
Les étapes clés d’une investigation numérique
Introduction:
Les enquêtes numériques jouent un rôle central dans la cybersécurité, notamment lorsqu’il s’agit de résoudre des crimes informatiques, de comprendre les incidents de sécurité ou de collecter des preuves pour des poursuites judiciaires. Une enquête numérique bien menée repose sur une série d’étapes méthodiques et rigoureuses qui garantissent la validité des preuves collectées et leur admissibilité devant un tribunal. Cet article explore les étapes clés d’une investigation numérique, de la collecte des preuves à leur analyse et présentation en justice.
1. Préparation de l’enquête
Avant de commencer une enquête numérique, il est crucial de bien se préparer. Cela implique la définition des objectifs de l’enquête, la planification des ressources nécessaires et la mise en place d’une équipe compétente. L’objectif de cette phase est de s’assurer que toutes les étapes suivantes se déroulent de manière ordonnée et efficace.
a. Planification initiale
Cette phase consiste à déterminer le cadre de l’enquête, en identifiant :
- Les systèmes à examiner (ordinateurs, serveurs, réseaux, appareils mobiles).
- Les types de données à rechercher (emails, fichiers, logs système, etc.).
- Les personnes impliquées dans l’enquête.
b. Évaluation des risques et des objectifs
Il est important de définir précisément ce qu’on cherche à prouver ou à résoudre. Il peut s’agir de déterminer la cause d’une fuite de données, d’identifier un attaquant ou de récupérer des informations disparues. Cela permet de guider toute l’enquête.
2. Collecte des preuves
Une fois la planification établie, l’étape suivante consiste à collecter les preuves numériques. Cette phase est cruciale, car elle détermine l’intégrité et la validité des informations collectées.
a. Préservation des scènes de crime numériques
Dans un contexte numérique, il est essentiel de préserver l’intégrité de la scène de crime (le dispositif infecté, le réseau, etc.). Cela signifie éviter toute altération des données. Les enquêteurs doivent travailler dans un environnement contrôlé pour ne pas altérer les preuves.
b. Création d’images bit-à-bit
Lors de la collecte des preuves à partir de disques durs, serveurs ou appareils mobiles, les enquêteurs doivent créer des copies exactes (images bit-à-bit) des supports de stockage. Cela permet de travailler sur une copie sans risquer de modifier les données originales. Ces copies sont ensuite utilisées pour l’analyse, laissant les preuves intactes.
c. Documentation de la chaîne de possession
Une documentation complète de la chaîne de possession est essentielle pour garantir que les preuves peuvent être utilisées en cour. Chaque action effectuée sur les preuves (collecte, transport, stockage, analyse) doit être soigneusement enregistrée.
3. Analyse des données collectées
L’analyse des données est la phase où l’enquêteur explore les preuves collectées pour trouver des indices et reconstituer les événements. L’objectif est d’extraire les informations pertinentes tout en respectant les processus légaux et en évitant toute modification accidentelle des données.
a. Examen des systèmes de fichiers et des journaux
L’une des premières étapes de l’analyse consiste à examiner les systèmes de fichiers (y compris les fichiers supprimés) et les journaux système. Cela permet d’identifier les traces laissées par les attaquants et de comprendre les actions qui ont eu lieu sur le système au moment de l’incident.
b. Recherche de données cachées ou chiffrées
Souvent, les cybercriminels cachent leurs activités sous forme de fichiers chiffrés ou dans des endroits non conventionnels du système (fichiers temporaires, partitions cachées, etc.). L’enquêteur doit utiliser des outils spécialisés pour récupérer ces données et les analyser.
c. Utilisation d’outils spécialisés d’analyse
Pour mener une analyse approfondie, les enquêteurs utilisent des outils de forensique numérique comme EnCase, FTK, Autopsy, ou X1 Search. Ces outils permettent d’extraire des données, de récupérer des informations supprimées et de fournir une analyse détaillée des systèmes de fichiers et des métadonnées.
4. Évaluation et interprétation des preuves
Une fois l’analyse effectuée, l’enquêteur doit évaluer les preuves recueillies pour déterminer leur pertinence et leur fiabilité. Cette phase consiste à reconstituer l’histoire de l’incident à partir des traces numériques trouvées.
a. Création d’une chronologie des événements
Une des étapes clés est la reconstitution d’une chronologie des événements basée sur les données recueillies. Cette chronologie permet de comprendre le déroulement de l’incident, depuis l’intrusion initiale jusqu’à l’impact final.
b. Identification des personnes et des outils impliqués
L’analyse permet aussi d’identifier les auteurs de l’attaque, qu’il s’agisse de cybercriminels ou d’employés malintentionnés, ainsi que les outils et techniques utilisés pour mener l’attaque (par exemple, un malware spécifique ou un exploit de vulnérabilité).
5. Préparation du rapport d’investigation
Après avoir analysé et interprété les données, l’étape suivante est la rédaction d’un rapport détaillé. Ce rapport doit être clair, objectif et structuré, car il sera utilisé à des fins juridiques et pourra être présenté devant un tribunal.
a. Présentation des résultats de manière claire et concise
Le rapport d’investigation doit inclure :
- Une description complète des faits.
- Les preuves collectées et leur analyse.
- Les conclusions tirées de l’analyse.
- Des recommandations pour améliorer la sécurité informatique et éviter de futurs incidents.
b. Respect des normes légales
Le rapport doit être rédigé en respectant les normes légales afin que les preuves et conclusions puissent être utilisées en justice. Il doit également inclure des informations sur la chaîne de possession des preuves.
6. Présentation des résultats en cour
Si l’enquête mène à des poursuites judiciaires, les résultats doivent être présentés en cour. Cela inclut la présentation des preuves, la démonstration des liens entre les données collectées et les actions illégales, ainsi que la confirmation de l’intégrité des preuves.
a. Témoignage en tant qu’expert
L’enquêteur en forensique numérique peut être amené à témoigner en tant qu’expert dans une affaire judiciaire. Il doit être en mesure de présenter de manière claire et précise ses conclusions et la méthodologie utilisée pour recueillir et analyser les preuves.
7. Conclusion:
Les investigations numériques sont des processus complexes qui nécessitent une approche méthodique et rigoureuse. En suivant les étapes clés de l’enquête, depuis la préparation et la collecte des preuves jusqu’à leur analyse et leur présentation en cour, les enquêteurs numériques peuvent résoudre efficacement des incidents de cybersécurité et aider à la mise en œuvre de sanctions appropriées. La capacité à maîtriser chaque étape du processus est cruciale pour garantir des résultats fiables et admissibles en justice.